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  • bernadette desage

Konbini-la fille de la supérette Sayaka Murata

Dernière mise à jour : 25 mars 2022


Aussi loin qu’elle se souvienne, Keiko n’a jamais réussi à trouver sa place dans sa famille ou avec ses camarades. Elle se perçoit comme « une enfant un peu étrange ».

Pendant ses études, elle est engagée en intérim dans un Konbini. : une supérette ouverte 24h/24 au Japon.

« Le personnel est soit jeune (étudiants cherchant un revenu pour financer leur formation ou leurs loisirs) soit du troisième âge (retraités en quête d’une activité et/ou d’un complément financier à leur pension) et travaille généralement aux 3-8 ou assimilées : une équipe de nuit, plusieurs équipes de jour, etc. Le turn-over est important donc le recrutement continu ». Source Kanpai ! 13/09/2021


Très vite, elle réalise que cet univers qui se construit sur des codes strictement définis et répétitifs va devenir un lieu apaisant où elle aura la sensation d’exister enfin.

« C’était à n’en pas douter le premier jour de ma vie en tant que membre normal de la société » p21.

Elle va travailler pendant quinze ans dans ce konbini, calquant son attitude, sa manière de vivre sur les autres employés. Elle s’empare de leur langage, de leurs codes vestimentaires, voire de leurs frustrations : « L’insatisfaction générale fait naitre une curieuse solidarité ». P29

Sa vie familiale et sociale demeure cependant inchangée. Elle doit faire face à deux reproches majeurs, ne pas être mariée et continuer à exercer ce travail au plus bas de l’échelle sociale.

"Les gens perdent tout scrupule devant la singularité, convaincus qu’ils sont en droit d’exiger des explications."

C’est alors que Shiraha est recruté par la supérette. Il défie l’autorité et ne respecte aucune consigne. Il met en cause les règles immuables.

Une étrange relation se noue entre ces deux êtres que tout oppose.

Shiraha esquisse une fêlure dans la vie de Keiko.





L’auteure :

Sayaka Murata a également travaillé dans une supérette.

« Depuis ses débuts dans le monde littéraire en 2003, Sayaka MURATA écrit des romans qui démantèlent la conformité du genre, de la sexualité et de la famille… à travers des histoires se déroulant dans des mondes dystopiques et étranges. Elle est particulièrement connue pour avoir écrit le livre La fille de la supérette, traduit en plus de 12 langues, dont le français. Ce roman s’est ensuite vendu à plus de 600 000 exemplaires imprimés rien qu’au Japon et a reçu le Prix Akutagawa en 2016, ce qui l’a officiellement projetée en tant qu’écrivaine de renommée nationale. »

Son dernier roman Les terriens vient de paraitre en France. Elle est aussi l’auteure de nombreux autres ouvrages.


Ce roman nous apprend beaucoup sur nous-mêmes et sur nos réactions à la pression sociale. De quoi, les konbinis sont-ils le nom chez chacun d’entre nous ? Dans quels lieux allons-nous quêter notre tranquillité pour ne pas sortir de notre zone de confort et cependant prendre notre risque face au conformisme ?

Satire sociale ou reportage documenté sur la vie au Japon ?

L’hypothèse d’un mariage sans relation sexuelle évoquée dans le roman (l’asexualité est récurrente dans l’œuvre de Murata) est un phénomène observé au Japon où la décroissance de la natalité inquiète. Les couples se forment sur un alibi social pour échapper à la violence infligée à qui déroge aux attentes de la société nippone très ritualisée

Le travail selon le lieu dans lequel il est exercé et sa forme de contractualisation nomme l’insertion ou la marginalité de l’individu.

Certains critiques voient dans cet ouvrage, la description d’une certaine forme d’autisme.

Pour ma part, j’ai lu le courage d’être soi dans un monde où les individus hostiles se regroupent afin d’être plus puissants face à qui les dérange dans ce qu’ils appellent leur normalité. Mais la normalité est toujours définie par l’autre, par sa peur.


Sayaka Murata : « Si je n’avais pas écrit, je pense que je serais restée avec ma souffrance. Chaque roman que j’écris me permet de démolir un peu les préjugés qui m’entravent, je le sens aujourd’hui encore. »

(Texte et interview de Murata Sayaka par Itakura Kimie, de Nippon.com) 27/11/2020


J’ai découvert cette auteure avec un grand bonheur. Elle manie l’humour avec subtilité, traque l’anecdote et le détail qui donnent une belle intensité à son univers.



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